FNSCE : La société civile congolaise plaide pour une transition énergétique inclusive et durable
Du 20 au 22 août 2024, Kinshasa a vibré sous le rythme de la deuxième édition du Forum National de la Société Civile sur l’Énergie (FNSCE2). A l’issue de ces assises, les représentants de la société civile congolaise ont émis une déclaration commune. Cette rencontre, axée sur les défis et les opportunités du secteur énergétique en République Démocratique du Congo (RDC), a permis aux participants de formuler des recommandations claires en faveur d’une transition énergétique durable et inclusive.
La déclaration commune issue de ce forum se concentre sur plusieurs axes stratégiques pour le développement du secteur énergétique en RDC.
Le constat de la société civile
Les travaux de la 2ème édition du forum national de la société civile sur l’énergie ont permis de faire un constat général du secteur.
Il a été relevé que 10 ans après la mise en œuvre de la loi, il y a nécessité de procéder à la réforme de ce cadre légal, entre autres pour prendre en compte les autres formes des énergies renouvelables, le chevauchement du cadre institutionnel, la lourdeur dans la procédure d’octroi des titres, des fortes disparités dans la tarification des opérateurs et autres.
Il a également été fait état du taux d’accès à l’électricité trop faible : de plus ou moins 9% en 2014, à plus ou moins 6% en 2019, selon le premier Forum sur l’Énergie de Matadi et à 7,4% en 2024 selon l’ARE et moins de 1% en milieux ruraux.
Par ailleurs, malgré quelques faits positifs relevés, tels que les efforts louables de l’ANSER dans l’électrification rurale et périurbaine, l’existence de plusieurs structures et institutions opérant dans le secteur de l’électricité, avec le chevauchement des attributions des uns et des autres ne permettent pas un développement du secteur ; la non-validation de la Politique Nationale de l’Énergie (…) quoi que déjà validée techniquement ; l’inexistence d’un Plan directeur de l’électrification nationale et provinciale de l’énergie quand bien même que l’ANSER a produit les Plans Locaux d’Électrification et l’Unité de coordination et de management des projets d’électricité (UCM), la Planification de l’électrification en zone urbaine. Il a aussi été relevé la lourdeur dans la passation des marchés publics des projets énergétiques qui ne s’adapte pas à l’urgence du développement du secteur ; la fiscalité sur la production de l’énergie étant très asphyxiante, avec la présence de plusieurs taxes, impôts et redevances à impact négatif sur la tarification ; la faible vulgarisation de la loi auprès des autorités politico-administratives au niveau national et des provinces, des opérateurs, des communautés locales et de tous les acteurs concernés par le secteur.

Autres faits relevés, la décentralisation énergétique demeure un défi majeur tenant compte du faible niveau des capacités de certains acteurs au niveau décentralisé ; l’absence d’une vision congolaise et claire sur le grand projet Inga.
Pour donner suite à cela, le pays ne fait que suivre les propositions des partenaires et développeurs qui se succèdent. Le faible financement du secteur de l’électricité par l’État congolais, avec comme conséquence la faible production d’énergie sur le plan national, ce qui fait que l’accès à l’énergie reste trop faible.
La domination du mix énergétique par le bois énergie, l’absence d’une stratégie de cuisson propre (en cours de développement), le défi de coordination multisectorielle sur la transition énergétique et écologique, ainsi que sur la justice énergétique en RDC avant de se proposer comme solution pour les autres ; la faible intégration du genre dans le secteur énergétique et dans les sphères de prise de décision ne facilite pas la tâche a la femme de se sentir impliquée dans le secteur.

Les principales recommandations
Comme il en est de coutume dans pareille circonstance, les participants au forum ont formulé des recommandations adressées aux différents échelons des décideurs.
Au Président de la République, le Forum a recommandé de créer un état d’urgence énergétique, pour rendre à l’effet les intentions émis pour le développement du secteur ; de privilégier la compétence dans la nomination des animateurs à différents niveaux du secteur, pour espérer obtenir un impact considérable afin de changer le paradigme et d’éviter la politisation du secteur ; de s’impliquer pour la réadaptation du cadre institutionnel du secteur de l’électricité pour plus d’impact.
Dans un autre registre, le FNSCE attend du président de la république, la création d’un fonds pour la recherche scientifique dans le secteur de l’énergie en RDC, pour faire face à la transition énergétique ; le développement d’une vision congolaise et claire sur le développement des projets énergétiques, y compris pour Inga afin que les développeurs suivent l’orientation de la RDC et non le contraire (…).

Au Gouvernement, les participants au forum ont recommandé d’augmenter la part du financement du secteur de l’énergie dans le budget de l’État et s’assurer le décaissement au profit des projets et actions liés au secteur de l’énergie ; de réadapter le cadre institutionnel pour harmoniser les attributions des structures et institutions du secteur de l’électricité en RDC ; de renforcer ou d’accélérer la mise en œuvre des projets énergétiques en cours de développement et à développer.
D’autres recommandations au gouvernement font état de travailler pour améliorer l’accès à l’information sur les énergies en RDC ; de développer une politique fiscale spécifique au secteur de l’énergie, pour booster les investissements en RDC ; de renforcer la vulgarisation de la loi N°14/011 du 17 juin 2014 relative au secteur de l’Électricité et la traduire dans les langues nationales ; d’élaborer des mécanismes d’allègement de la loi sur la passation des marchés publics dans le secteur énergétique.
Le financement de la production des études d’impacts environnementaux et sociaux des sites énergétiques cartographiés, pour rendre bancable les projets d’électrification ; la création d’un fonds pour la recherche scientifique dans le secteur de l’énergie ; la fiabilisation des statistiques, des indicateurs de développement durable de l’accès à l’énergie en RDC et la mise en place des politiques qui encouragent l’implication des femmes dans le secteur de l’énergie sont autant de recommandations adressées au gouvernement congolais.

Au Parlement, il est recommandé de prioriser la revisitation et l’adoption de la loi portant secteur de l’électricité, qui devra répondre aux besoins de l’amélioration de l’accès à l’énergie pour tous ; d’augmenter les allocations budgétaires en faveur du secteur de l’énergie dans la loi des finances pour concrétiser la volonté du Chef de l’État ; de renforcer le contrôle parlementaire de façon rigoureuse pour le secteur de l’électricité, vers un régime des résultats et d’impacts réels sur l’accès pour tous à l’énergie.
A l’ARE et l’ANSER, de rendre accessible les informations sur le secteur ; faire la publicité de réalisation de tous les projets énergétiques (en termes d’information et du coût) ; d’initier ou de réformer la loi tenant en compte des autres formes énergies renouvelables ; d’élaborer les mécanismes d’allègement de la loi sur la passation des marchés publics dans le secteur énergétique ; créer un fonds pour la recherche scientifique du secteur et de renforcer ou accélérer la mise en œuvre des projets énergétiques en cours.
La société civile a également recommandé à ces deux structures spécialisées, d’alléger sensiblement la fiscalité du secteur pour booster l’investissement ; de fiabiliser les statistiques du taux de la desserte en énergie sur le territoire national ; de clarifier les attributions des différentes structures. Mais aussi de parachever la réforme de la SNEL ; de modifier, simplifier et clarifier les procédures et règles tarifaires du secteur; d’accentuer la vulgarisation de la loi par la société civile pour une appropriation adéquate des populations et faire un plaidoyer pour avoir un plan de travail collégial des différents ministères concernés et les ETDs.

À la Société civile congolaise, le Forum a aussi adressé des recommandations. C’est entre autres, mettre en place un observatoire qui travaille sur l’accès à l’énergie et le suivi des recommandations assorties des assises; renforcer le plaidoyer en faveur du respect des droits humains des communautés locales d’Inga ; renforcer les capacités des acteurs, particulièrement des jeunes dans les milieux ruraux, pour leur implication en vue de contribuer à l’électrification du pays ; créer plus d’espaces de discussions pour faciliter les réflexions sur le développement du secteur de l’énergie.
Autre recommandation faite, c’est la promotion de l’implication des communautés locales dans toutes les étapes du développement des projets énergétiques.
Il sied de noter que la déclaration commune du deuxième Forum National de la Société Civile sur l’Energie en RDC constitue un appel pressant à l’action pour une transition énergétique inclusive et durable.
La société civile congolaise, par cette initiative, montre sa détermination à jouer un rôle de premier plan dans la transformation du secteur énergétique du pays. Une façon pour elle de pousser le gouvernement congolais à atteindre l’objectif de développement durable 7 de l’ONU, “Garantir l’accès de tous à des services énergétiques fiables, durables et modernes, à un coût abordable”.
La Rédaction
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